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22 juillet 2009 3 22 /07 /juillet /2009 10:35

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 LES DOSSIERS DE L'ÉTÉ 2009

peinture, cinéma, littérature


 

 Valérie Favre





La visiteuse.


Valérie FavreL'architecture du Carré d'Art, le majestueux bâtiment conçu par Norman Forster pour accueillir un musée et une bibliothèque à Nîmes est un vrai cadeau pour les artistes. Le musée installé en couronne autour d'un vaste atrium permet aux oeuvres de se déployer en séries précises ou en groupes restreints de grands formats dans les belles salles d'exposition. Durant l'été 2009 Valérie Favre nous propose dans ce lieu d'exception ses "Visions", une première exposition muséale pour la jeune artiste européenne qui trouve là avec la complicité de Françoise Cohen, la directrice de l'établissement, l'occasion d'une réflexion approfondie sur son travail. Une affaire de femmes disent certains sceptiques pour évacuer le véritable motif de la controverse : le renouveau du langage pictural et des valeurs du clacissisme qui posent toujours problème en France.


Le large escalier qui conduit au musée est surplombé par deux immenses bannières conçues par l'artiste à partir de la célèbre scène du landau du Cuirassé  Potemkine d'Eisenstein. Elle a agrandi à la  dimension  de l'architecture des gouaches et encres de 10 sur 20 cm. Recoupées, montées plusieurs fois, elles procurent aux images recomposées sur les bâches une mobilité et un rythme qui évoquent la pellicule. Dans cette atmosphère cinématographique on  débouche sur une première salle ouverte  de toute part qui accueille un socle central rappelant le podium sur lequel se tient  la déesse du logo des studios Columbia Pictures. Il est entouré de grandes huiles sur papier et de petites toiles de la série des Lapines. Les femmes aux longues oreilles soyeuses et aux jambes gainées de cuissardes, aux allures d'actrices de musicall  ont déserté le podium pour s'installer dans les tableaux. Le socle déserté est maintenant garni de simples photocopies, notes de l'artiste et couvertures de livres en grand nombre.

Valérie FavreCette entrée en matière  sous forme de générique filmique annonce les collaborateurs tacites choisis par Valérie Fabre : le cinéma et la littérature. On retient en passant les ouvrages de Thomas Bernhard, ceux de  Franz Kafka, Les Mythologies de Barthes, L'Interprétation des contes de fées de Marie-Louise von Franz... Le dispositif dans sa globalité est une mise en espace du parcours d'obstacles, des rencontres, des recherches d'une artiste-peintre qui se définit comme le metteur en scène de ses rêves d'enfant, d'adolescente et d'adulte.



Valérie Favre se comporte en auteur. Avant de réaliser un tableau, elle prend des notes, écrit un synopsis, puis développe la peinture avec ses bonheurs et ses accidents. Le tableau est répertorié comme si c'était une véritable histoire avec ses événements et ses étapes. Toujours avant  de commencer, l'artiste rend visite à de grandes oeuvres : "je pique ostensiblement et montre ce que je pique". "L'Art n'est fait que de visites." De ses excursions et autres voyages dans l'histoire de l'art, Valérie Favre ramène des trésors. Elle fait provision de nombreuses références picturales, jamais de citations. Elle accumule ainsi   beaucoup de vécu dont se dégage une énorme énergie qui bientôt réclame le "lâcher prise" de l'oubli.  Puis elle peint entre contes et références cinématographiques, picturales et littéraires. 



Toutefois ses mythologies sont aussi contemporaines. Sa peinture  n'illustre pas seulement un panthéon personnel (la lapine, l'aigle déchu, les centaures, les majorettes)  ne joue pas seulement avec les références, les frères Grimm, kafka, Goya, Manet... elle porte aussi une réflexion sur la scénarisation de la société contemporaine  (Autos dans la Nuit ou  Suicides). Dans cette figuration en dehors de tout réalisme, les multiples personnages peuvent avoir une double identité, une dimension parodique ou fantasmée,  un caractère allégorique ou baroque. Un flux allusif traverse les atmosphères les plus sombres (les Kakerlake, Das Gebet). Des accents féériques ponctuent les tableaux aux couleurs les plus solaires (Le Diable probablement, Suggestion).


L'exposition rassemble dans les différents espaces plusieurs ensembles d'oeuvres réalisées entre 2002 et 2009. Ils entretiennent des rapports entre eux. Ils peuvent être en rupture, ainsi Balls and tunnels la suite d'abstraits rituellement réalisés une fois l'an. Ou ils peuvent résulter les uns des autres, sans souci de redites ou de contradictions. Dans l'oeuvre de Valérie Favre le temps ne fait rien à l'affaire, ce qui compte c'est l'espace,  la matière picturale et sa variabilité.

Catherine Plassart






Valérie Favre
"Volière I (Der Anfang)", 170 x 390 cm, oil on canvas, 2008






Valérie Favre
Peter Pan, 2007, huile sur toile, 200 x 180 cm. Courtesy Galerie Barbara Thumm





Valérie Favre
"Autoscooter Garage No.1", 250x310 cm, Oil on Canvas, 2008





Valérie Favre
 "Kakerlake No.1", 250x195 cm, Oil on Canvas, 2008 




photos : (1) Lapine Univers Columbia, Zauberin, 2008, huile sur papier, 225 x 152 cm. Courtesy Galerie Jocelyn Wolff, (2) Autos in der Nacht, Autos in der Nacht, 2004-2006, 24 peintures, huile sur toile, 30 x 40 cm chacune. Courtesy Galerie Jocelyn Wolff, (3) Das Gebet, Das Gebet, 2005, huile sur toile, 40 x 60 cm. Collection privée, Berlin



Informations pratiques :

Valérie Favre
"Visions"

du 27 mai au 20 septembre 2009

Carré d’Art – Musée d’art contemporain
Place de la Maison Carrée - 30000 Nîmes
04 66 76 35 70
info@carreartmusee.com

Ouvert du mardi au dimanche inclus de 10h à 18h

voir aussi : le site du Carré d'art, le site de Valérie Favre, le site du photographe Jean-Pierre Loubat  




 

 Catherine Plassart 

Catherine Plassart - contact@artpointfrance.org

Les dossiers de l'été 2009

 

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